Faut-il qu’il y ait cet abominable crime contre un ressortissant américain pour comprendre la nature et l’ampleur de l’avilissement qui a marqué à jamais une large frange de notre jeunesse? Faut-il attendre qu’un désespéré franchisse le pas de non-retour, pour que la société se rende compte que les larves de l’homosexualité vivent et se développent parmi nous, à découvert, sans pour autant lever le moindre tollé et encore moins susciter des signaux de prévention, de la part de ceux qui sont censés sécuriser notre société?
Aujourd’hui encore, les rouages de cette machine, rodée pour broyer les jeunes ont repris de l’ouvrage comme si de rien n’était. Et les chefs de file, spécialisés dans le logement illicite des étrangers douteux, hissent de nouveau leur voile, sans trop s’inquiéter pour leur business et encore moins des hypothétiques dégâts qu’ils peuvent occasionner aux centaines de jeunes en situation difficile.
Aujourd’hui encore, l’un des milliers de nos jeunes attend la sentence des tribunaux. Il a péché dans des milieux malsains que nous avons tolérés pour lui ainsi que pour ces autres irresponsables, engagés dans les mêmes chemins du désespoir. Les bruits des derniers coups d’éclat d’une certaine arrestation se sont déjà estompés et la viande fraîche livrée aux lynchages médiatiques ne fait plus la une, pour être supplantée par un autre scandale, hypocritement signalé comme une nouvelle découverte.
Là aussi, nous est-il permis d’attendre que les relents de cette affaire de réseau de prostitution empruntent les milieux de Damas, pour lever les boucliers et mettre les machines en branle, là où la tête du monstre se gave allègrement par d’innocentes jeunes filles, en quête d’un infirme espoir de survie. Victimes d’illusions et assez naïves pour se rendre compte qu’elles ne sont pas assez protégées, pour pouvoir tenir tête à ces tentacules qui tuent la dignité et dont les traces sont assez visibles pour omettre de les pister à temps et éviter le pire à de nombreuses jeunes filles, aujourd’hui au banc d’une société qui ne pardonne pas.
Pourtant, les antécédents d’une telle pratique avaient déjà été signalés et ses commanditaires appréhendés depuis 1995, sans que cette mise en garde puisse inquiéter les actuelles inculpées et encore moins les empêcher d’évoluer à tout vent, dans certains cafés de la place, là où les indics et autres informateurs ont installé depuis longtemps leurs bases attitrées.
Le fossé s’avère aujourd’hui assez large entre l’action de proximité et les interventions dictées par les impératifs de certains événements difficilement muselables. Et c’est là où se joue tout le dessein de cette jeunesse, pleine de vitalité, mais terrassée par le désœuvrement, tout en étant considérée comme un terrain de prédilection, dont la fertilité appâtera encore et toujours tous les professionnels de l’arnaque, du proxénétisme, de l’homosexualité et de la prostitution.
Combien sont les victimes qui ont bavé sur les chemins de Damas, pour s’avilir dans les circuits de la honte et de l’esclavagisme moderne, sans que leur détresse ait assez de force pour percer les murs du silence? Quel est le nombre de ces autres victimes en instance, prises elles aussi sous l’emprise de l’hypnose de ces lendemains supposés meilleurs dans un quelconque pays frère avec lequel nous partageons les mêmes valeurs? Quel sort a-t-on réservé aux centaines d’autres ressortissantes marocaines, acheminées sur des tapis de mensonges vers d’autres pays arabes, signalés aujourd’hui comme des destinations-appâts, mais dont les mirages n’ont pas manqué de séduire, là où toutes les portes de l’espoir s’avèrent hermétiquement fermées. Pourtant toute cette force vive de notre pays n’aspire qu’à s’épanouir dans le droit et la dignité humaine.
La sonnette d’alarme déclenchée tout récemment par le ministère des Affaires étrangères, suite à une formation émanant du consulat marocain à Damas, a fait l’effet d’un véritable pavé dans la mare.
Un signal fort qui devrait trouver son répondant dans les instances nationales afin de trouver les parades indispensables pour la protection de notre jeunesse contre un fléau trop alléchant dans cette mer démontée où notre jeunesse à la dérive tente de s’accrocher à tout ce qui ressemble à une bouée de sauvetage.
Aujourd’hui, les dangers qui guettent nos jeunes sont multiples. Ils sont omniprésents, à l’état latent ou à visage découvert. Et les tentations que suscite notre jeunesse chez tous les prédateurs qui nous arrivent d’autres lieux risquent de nous jouer des tours et des coups bas encore plus redoutables.
Oserons-nous avancer que notre société est ainsi faite et que nous n’y pouvons rien? Loin s’en faut. Notre pays a déjà démontré ses capacités et sa cohésion pour les causes nobles et vitales pour la préservation de notre intégrité territoriale et notre dignité de peuple fier et pacifique. Maintenant, nous estimons qu’il est plus que temps de juguler toutes les hémorragies qui saignent notre corps de demain. On aurait grand tort de clore ce nouveau et triste chapitre pour tourner rapidement la page sur tous les maux qui gangrènent nos jeunes sous forme de réseaux de tous les mirages. Et pour ce faire, la prévention s’avère l’une des priorités absolues, dans l’attente de la délivrance salutaire.
B. S. Libération 11-02-2004