Doukkala le grand rendez-vous d’une ambition

S’il y a un rêve auquel El Jadida s’est accrochée depuis le début des années 80, sans jamais verser dans le défaitisme, s’est bien le fait de mûrir sous l’auréole du deuxième pôle économique du pays. Un titre qui ne peut avoir toutes ses grandeurs sans que ne soient prises en considération les différentes composantes qui balisent les voies vers cet objectif, à savoir la triple vocation de cette région, qui est solidement arrimée aux créneaux agricoles, touristiques et industriels.
Aujourd’hui, on estime que des pas décisifs ont été franchis et que l’essentiel est déjà mis en place. El Jadida est à l’heure de ses grands rendez vous. D’une part, l’extension de son périmètre agricole irrigué a favorisé l’intensification des cultures et de l’élevage et l’utilisation des moyens de production modernes, d’autre part les deux autres secteurs clés, qui déterminent son avenir, ne sont plus à la traîne : Le tourisme prend des proportions internationales, suite à l’impulsion du mégaprojet de la station balnéaire de Haouzia « Mazagan », alors que le projet du parc industriel de Jorf Lasfar, d’une superficie de 500 ha, est en passe de propulser la région vers la sphère des pôles économiques les plus actifs.

TOURISME : DE DEAUVILLE A MAZAGAN

Si la baie d’El Jadida a conquis le cœur des Portugais durant deux siècles et demi au grand hasard d’une nuit de tempête, il n’en demeure pas moins que sa dénomination en tant que « Deauville marocaine », par le Général Lyautey au début du 19éme siècle, ne découle pas de cette même logique. Le stratège Français, qui a détecté très tôt la force attractive de cette pointe de l’atlantique Marocain a depuis ce temps là, scellé le sort de la charmante Mazagan, en lui prédisant un avenir des plus prometteurs sous le signe du tourisme.
Longtemps après, El Jadida s’est retrouvée confinée très à l’étroit dans cette vocation gardée à son état primaire, en faisant abstraction de toute initiative et de la moindre stratégie de développement en la matière, réduisant ainsi toutes ses chances de cette ville qui promettait tant, en une simple destination balnéaire, fortement appréciées lors des grandes vacances estivales, et désespérément désactivée le reste de l’année.
Le caractère rural de la province d’El Jadida et la grande valeur ajoutée que dégagent les activités agricoles de l’arrière pays, n’ont pas manqué de creuser le fossé et faire basculer cette vocation première au second plan. El Jadida est considérée alors comme la « capitale des Doukkala » ; avec tout ce que cette nouvelle appellation sous entend comme résonance rurale, voire campagnarde.
Les prémices industriels déclenchés à partir du début des années 1980, qui ont été marqués par l’émergence du port de Jorf Lastar et des noyaux d’autres zones industrielles ont été déterminants dans la nouvelle réorientation d’El Jadida. Le tourisme en tant que vision et culture se trouve alors fortement affecté et ne suscite plus qu’un intérêt minime et très secondaire, ne figurant sur aucun calendrier des instances locales. Le seul cordon ombilical qui a pu résister aux nouvelles tendances économiques de la province continue à se nourrir essentiellement des langueurs océanes que procure aux visiteurs une généreuse côte, au potentiel naturel riche et diversifié.
Du coup, El Jadida s’impose en tant que futur deuxième pôle économique du pays à vocation agricole et industrielle. Le renforcement du port de Jorf Lasfar par l’implantation de complexes industriels d’une envergure internationale, en plus de la modernisation du secteur agricole, mobilisent toutes les énergies de l’administration et annihilent les derniers résidus d’instinct et de reflexes qui animent les instances chargées de promouvoir le tourisme dans la région : le syndicat d’initiative du tourisme d’El Jadida ne figure plus que dans le papier, celui d’Azemmour qui faisait piètre image a baissé les rideaux, la délégation du tourisme est réduite à gérer le quotidien d’un personnel peu qualifié, les pouvoirs publics et les instances politiques n’émergent de leur léthargie que le temps d’une saison estivale, lorsque des milliers de visiteurs en quête de fraîcheurs se bousculent aux portes des habitants, pour s’entasser dans des maisons louées à la chambre, alors que les nuitées sont payées au prix fort, en l’absence quasi-totale de structures hôtelières. Le tourisme s’est ainsi réduit à sa notion la plus abstraite.
Si on a opté par ce survol succinct à titre d’introduction, c’est pour nous inscrire dans l’air du temps qui a longtemps prédominé en matière d’évolution économique de la ville d’El Jadida, ainsi que les différentes bifurcations qu’a connu le développement économique de la province, tout en soulignant la place peu engageante du secteur touristique tout au long des dernières années.
Et c’est dans ce cadre là que vient s’inscrire la réalisation de l’une des plus importantes stations balnéaires du pays, MAZAGAN, qui entre dans le cadre du plan Azur et sa vision 2010.
Un projet qui doit faire appel à une nouvelle dynamique, non seulement liée à l’implication des différents acteurs de l’administration, mais tout aussi bien de la part de toutes les composantes de la société, que ce soit dans les villes qu’au niveau du milieux rural.
Toujours est-il qu’au-delà de ces multiples rebondissements qui n’ont pas été pour marquer nettement la réelle « identité » économique de la province, il s’avère que les grandes constantes, à connotation historique, culturelle et naturelle continuent à plaider pour ce grand avenir touristique auquel devait être vouée cette région depuis très longtemps.
La forte charge historique, dont les fragments continuent à être immortalisés à travers des monuments exceptionnels et des vestiges témoins d’époques lointaines, les traditions culturelles et cultuelles spécifiques au Doukkala, toujours omniprésentes dans l’arrière pays, et surtout les multiples aspects naturels et environnementaux, que ce soit au niveau d’une côte fortement attrayante ou dans les profondeurs du Doukkala… sont autant de points forts qui appellent aujourd’hui à être répertoriés et valorisés pour servir de plate forme au développement touristique de cette région du pays, qui dispose de tous les atouts pour réussir son nouveau pari et reconquérir sa légitime position de destination par excellence.

JORF LASFAR : LE DETONNATEUR INDUSTRIEL

Ouvert au commerce International depuis 1982, le port de Jorf Lasfar constitue l’un des maillons forts de l’infrastructure portuaire du Maroc. Outre sa vocation première de transit des produits phosphatiers, énergétiques et conventionnels, il se trouve dans une région qui se distingue par ses richesses agro-alimentaires et ses potentialités industrielles.
Disposant de capacités nautiques lui permettant d’accueillir des navires de port en lourd de 120.000 tonnes, Jorf Lasfar est conçu pour répondre à un trafic maritime de plus de 25 millions de tonnes grâce à ses infrastructures, à son outillage et au développement des complexes phosphatiers, thermique et d’une zone industrielle de grande importance.
La capacité de traitement du port va fortement augmenter avec l’aménagement du futur parc industriel de Jorf Lasfar qui est situé, à proximité du port. Ce parc, d’une superficie de 500 ha, accueillera des unités industrielles Nationales et Internationales de première catégorie, qui enrichiront le secteur industriel local et National tout en contribuant à l’accroissement du trafic portuaire.
Le coût d’aménagement de ce parc industriel, comprenant les infrastructures In site et Hors site, est évalué à l’équivalent de 1.500 millions de Dirhams. Le projet aura un impact important sur l’économie de la région, se traduisant par un investissement projeté de 14 milliards de Dirhams et la création prévue de 25 000 nouveaux emplois.

AGRICULTURE : UN SECTEUR CLE

Si le secteur agricole dans la province reste dominé par le mode de production extensif en bour. L’extension du périmètre irrigué a favorisé l’intensification des cultures et de l’élevage en plus de l’utilisation des moyens de production modernes.
L’aménagement des plaines des Doukkala-Abda a permis d’assurer l’irrigation en grande hydraulique de 96.000 ha dont 7000 ha relevant de la Province de Safi répartis entre deux périmètres : Périmètre bas service (61.000 ha) et périmètre haut service (35.000 ha), dont 7000 ha relevant de la province de Safi.

Plusieurs types de cultures caractérisent la province dépendant de la nature des terres cultivables, de leur situation (Sahel – Oulja, ou les plaines et plateaux internes; zones irriguées ou bour) et des superficies des parcelles. Cette mosaïque donne une grande variété de cultures allant des céréales destinées à la consommation de la population et du bétail, aux fleurs exportées. La région se caractérise par la production de la betterave à sucre, des céréales, les cultures maraîchères, le lait, les viandes rouges et blanches et les œufs de consommation.
D’autres cultures peuvent être pratiquées comme le tournesol, le soja, le coton et le tabac en cas de disponibilité d’eau d’irrigation. Le taux d’intensification culturale moyen étant de 129 % en année normale.

CHAHID Ahmed – Libération du 30-10-2007
m.ahmedchahid@yahoo.fr