Peut-on encore éviter la ruralisation généralisée du marché central d’El Jadida, qui est considéré comme l’un des doyens en la matière à l’échelle nationale, à l’instar de celui de Casablanca, dont les similitudes sont d’une impressionnante beauté architecturale ?
Cette interrogation qui interpelle à plus d’un titre, fait aujourd’hui des émules dans les milieux jdidis et autres nouveaux résidents, qui n’arrivent toujours pas à comprendre les vraies raisons du laxisme des responsables communaux vis-à-vis de ce joyau qui tombe sous le couperet de la décrépitude et de l’oubli.
Absence d’hygiène, étalages anarchiques et dégradation alarmante des locaux au niveau du premier étage, dont la quasi-totalité sont fermés et à l’état d’abandon… Ce sont là les seules caractéristiques qui peuvent qualifier l’état des lieux de ce monument qui aurait dû connaître des jours bien meilleurs.
Onze locaux seulement, sur un total de près de cinquante unités, sont à l’abandon au premier niveau de ce marché, pourtant situé au pied du Quartier Plateau et à quelques dizaines de mètres du centre-ville. Une défection qui découle, nous informe-t-on, du fait que certains membres des conseils de la ville, qui se sont succédé à la tête de la ville depuis les années 70, se sont généreusement servis, ainsi que leurs proches et amis, sans pour autant arriver à se découvrir une vocation commerciale. Et c’est le blocage à ce niveau-là qui a signé l’arrêt de mort de cette structure commerciale, qui faisait autrefois la fierté d’El Jadida, plus connue sous le nom de Mazagan ou Deauville marocain.

Les autres anomalies qui portent atteinte à la viabilité du marché central et qu’un œil averti ne manque pas de relever, ont trait à l’absence des toilettes publiques, qui existent aux deux bouts du marché, mais dont les entrées ont été curieusement murées, dans l’attente, nous confirment certaines sources, d’une opportunité de leur conversion en locaux de commerce ou leur annexion aux boutiques limitrophes. Même une partie des six escaliers desservant le premier étage ont été squattés et intégrés carrément pour servir de plateforme à l’étalage de certains produits commerciaux.
Pourquoi tout ce laisser-aller ? Pourquoi toutes ces négligences ? Pourquoi toutes ces impunités ? Les responsables communaux seraient-ils assez déconnectés des lendemains prometteurs qui attendent leur ville, pour passer à côté des avantages d’un noyau commercial de première importance ?… Autant de questions qui restent encore loin de trouver des échos crédibles, tant que la commune urbaine et ses animateurs ne se sont pas encore imprégnés du nouvel air du temps qui est en train de souffler sa métamorphose sur El Jadida, pour en faire un pôle de grande attraction économique et touristique.
Il faut souligner que ce marché central qui a été inauguré le premier mai 1932, représente l’un des précieux legs des temps du protectorat, à l’instar du théâtre municipal, du bâtiment de la poste ou encore du monument historique où siège actuellement le Centre régional d’investissement et qui était destiné à abriter le premier musée de la ville…Hélas !
La vocation initiale de ce centre commercial, était alors orientée uniquement vers des produits alimentaires, en plus d’une aile pour les fleurs et une autre pour les poissons et fruits de mer ?
Aujourd’hui, c’est toute une gamme de produits et de commerces hétéroclites qui sont en train de s’imposer à tout-va et n’importe comment, dénaturant outrageusement, ainsi ce lieu qui aurait dû représenter une plus-value incontestable pour toute la ville.
Serait-il trop demander au responsable de la ville de se saisir de ce dossier et diligenter une commission pour sauver ce qui reste à sauver ?… En tout cas, si on prend en compte l’état déplorable des deux seuls souks de la ville, en l’occurrence celui de Bir Brahim et l’autre, connu sous le nom de Allal el Kasmi, qui sont à mille lieues des normes les plus élémentaires en matière de salubrité et d’organisation, on comprendrait mieux que ce ne serait pas un luxe que pourrait se permettre El Jadida, en s’impliquant dans la mise à niveau du marché central, afin de lui rendre son respect d’autrefois et sauver ainsi la face de cette future destination touristique, avant qu’elle ne soit prise de court par la précipitation des évènements.
Ahmed Chahid
m.ahmedchahid@yahoo.fr