Ces derniers temps, l’utilisation du terme « Gouvernance » est devenue une règle à la mode de l’air du temps. Ce nouveau concept s’est répandu sur la planète comme une vraie traînée de poudre. Tout le monde en abuse, les politiciens, en tête, l’utilisent à profusion pour la propagande de leurs doctrines émoussées, les économistes en font une plateforme pour leurs théories visionnaires et les bailleurs de fonds une sorte de prophétie du nouvel ordre mondial.
Certes, ce nouveau design de gestion se présente sous des parures étincelantes et regorge de promesses pour les Hommes quant au devenir de leur vécu vers une dimension démocratique, juste et équitable, mais l’inconvénient réside dans le statut même du prophète de ce concept de la gouvernance, en l’occurrence l’establishment économique international.
Il faut dire que pour nous autres, citoyens du monde, profanes par excellence quant aux vrais enjeux tablés sur l’échiquier mondial, objets d’aliénation économique de surcroît et sujets d’obédiences idéologiques sous toutes leurs formes, nous ne croyons plus à la sincérité des bonnes intentions de ces prédicateurs de la démocratie qui revêtent l’habit de l’ancien seigneur et brandissent leur véto selon leur bon vouloir.
Et pour cause, depuis que les systèmes conventionnels de gestion des hommes et de leurs affaires battent de l’aile et semblent aller à vau-l’eau, l’establishment ne cesse de chercher une alternative pour survivre à ce qu’il qualifie de crise de gouvernabilité. Ainsi, les bailleurs de fond ont concocté plusieurs projets pour unir leurs forces, trouver des compromis quant au partage des ressources naturelles de la planète et des marchés, mais surtout pour trouver la formule magique afin de perdurer et d’assurer la pérennité de leur influence aussi bien notable que profitable. Ainsi, après le capitalisme moderne ; l’ouverture économique, la mondialisation et le néo-institutionnalisme, la dernière trouvaille fut la gouvernance. Cette dernière s’incarne sous la forme d’une véritable révolution structurelle au niveau des systèmes politico-socio-économiques actuels et qui se sont essoufflés devant la célérité du développement des hommes et devant l’envergure et la légitimité de leurs revendications.
Pour comprendre ce nouveau concept qui a adopté la méthode pavlovienne pour conditionner aussi bien les états que les hommes, il faut d’abord cerner le terme, ensuite décortiquer ses fondements épistémologiques et enfin tenter de saisir les vraies portées et visées du dessein de son enracinement dans le vécu de nos contemporains.
Le fait est que depuis l’avènement du concept de gouvernance durant le siècle dernier, la littérature abonde sur le sujet. La gouvernance désigne-t-elle un processus économique ? Une politique néo-institutionnelle. Une révolution structurelle alternative à la démocratie ? Ou est-ce simplement un système en réseau régissant les relations d’acteurs réunis avec l’objectif d’engendrer des profits ou une meilleure gestion des placements ?
A première vue, la gouvernance se présente comme une nouvelle phase dans les processus de gestion et une forme avancée de la démocratie. Soit ! Avec son atout de proximité, elle relie la participation des citoyens avec la transparence et la reddition des comptes de tout le monde, avec comme cerise, la parité…Que c’est alléchant ! Mais, il reste que pour convaincre les habitants de ce grand village qu’est devenue la terre, c’est une autre paire de manche, car ces derniers ont plutôt tendance à redouter que celui qu’ils croient être Moise s’avère plutôt être pharaon !
Et pour cause, dans ce monde où l’information est produite profusément et véhicule aussi bien la vérité que l’intox, les hommes, devenus soupçonneux, sont bombardés sans relâche par une multitude de définitions de la gouvernance qui sont souvent non consensuelles et associent généralement le terme aux adjectifs dithyrambiques de « bonne » ; « saine », « démocratique » etc., toutefois, elles militent toutes en faveur de la qualité de la gouvernance, mais subodorent quant même une révolution ai niveau de la gestion des hommes et de leurs affaires.
Revenons donc un peu en arrière pour tenter de comprendre le vrai sens du terme. L’histoire commence avec la fameuse métaphore de Platon qui utilisa le verbe grec kubernân (piloter un navire ou un char) pour désigner le fait de gouverner les hommes. Il a donné naissance au verbe latin gubernare, qui revêtait les mêmes significations et qui, par le biais de ses dérivés, dont gubernantia, a lui-même engendré de nombreux termes français : gouverner, gouvernement, gouvernance, etc.
Les mouvements sociaux urbains à idéologie autogestionnaire des années 1960 et 1970 ont été les premiers à réutiliser la notion de gouvernance, mais sans en utiliser le terme. Puis, au cours de la fin du siècle dernier, c’est au tour des techniciens de la modernisation de la gestion publique, notamment la Banque mondiale, d’être les agents décisifs de la vulgarisation du terme. En fait, la banque mondiale a introduit le concept dans le champ des relations internationales et en a identifié quatre critères (gestion du secteur public, l’état de droit, l’information et la transparence et enfin la responsabilité) n’est-ce pas trop beau ?
La gouvernance a ensuite été adoptée par les mondains des régimes internationaux, puis par la Commission européenne, sous la forme d’un concept véritablement construit. Cette résurrection du terme de gouvernance désigne toujours « l’art ou la manière de gouverner », mais avec deux préoccupations supplémentaires, d’une part, bien marquer la distinction avec le gouvernement en tant qu’institution et d’autre part, promouvoir un nouveau mode de gestion des affaires publiques fondé sur la participation de la « société civile » à tous les niveaux. Notons également qu’aux yeux des analystes universitaires, le développement épistémologique du concept de gouvernance est du à l’émergence du capitalisme moderne.
Pour mieux cerner l’avancée de l’implémentation du concept de bonne gouvernance dans notre ère, il faut revenir à la source qui a été le précurseur de l’ancrage de ce qui sont désormais et communément appelées les bonnes pratiques de gouvernance. Cette source reste la muse par excellence pour élaborer les textes relatifs au gouvernement d’entreprise, en l’occurrence l’OCDE. Cette organisation se targue d’être l’un des meilleurs éditeurs mondiaux dans le domaine de l’économie et les politiques d’administration publique, et dont les vraies visées restent toutefois nébuleuses puisque cette organisation avoue être au service de ses membres, lesquels composent l’essentiel de l’establishment financier du monde actuel. Bref, cette organisation constitue actuellement la référence pour la ponte des textes de lois et des recommandations ainsi que des lignes de conduites pour les états qui « veulent » s’inscrire dans cette nouvelle approche gestionnaire qui dépasse les concepts effondrés du siècle dernier (capitalisme, socialisme, communisme etc.)
De ce voyage dans l’histoire, il est important de retenir que la fameuse métaphore de Platon sur le fait de gouverner les hommes a donné naissance à l’ambition mégalo de certains de vouloir non seulement avoir main mise sur le marché international, mais contrôler totalement les Hommes.
Maintenant, voyons la position de ceux qui donnent le sentiment de tenir le gouvernail du monde ou du moins jouent-ils au Salomon pour trancher sur tous les conflits du monde. D’après l’approche américaine, le domaine d’application moderne de la gouvernance est la gouvernance d’entreprise, ou corporate governance. Cette pensée d’outre atlantique a rapidement évolué et ses initiateurs primés par le Nobel, pour bons et loyaux services.
Le paradoxe de cette vision, bien au service de la loi du marché, réside dans le fait que ses fondements se basent sur le néo-institutionnalisme qui est une école de pensée sociale qui interprète, dans des termes strictement économiques de rendement et d’efficacité, les relations sociales et politiques, n’est-ce pas là une belle fractale de la fresque ennemie d’hier ?
Cependant, là où cela devient saisissant, c’est lorsqu’on examine attentivement le cadre même des structures de la gouvernance, autrement dit, l’ensemble des dispositifs nécessaires pour effectuer des coordinations efficaces entre les acteurs du concept.
De ce cadre, découlent plusieurs sous concepts et théories à laisser pantois machiavel lui-même. Egrenons quelques unes à la manière du chapelet soufi pour en connaître la lumière. Tout d’abord, émerge la théorie des coûts de transactions, puis celle des droits de propriété ou celle de l’agence et d’autres encore, toutes bien enfilées et fort structurées, mais surtout la perle du cordon, en l’occurrence, la conception génératrice de la firme qui constitue un mode de coordination alternatif au marché en se basant sur un vrai postulat : « Sur le marché, la coordination des individus se fait par le système de prix »
Et oui, pour ce concept chacun a un prix car la coordination par les prix entraîne des coûts de transaction (coût de recherche, d’information, coût de négociation…). En outre, La théorie des droits de propriété consiste à considérer les formes de propriété en tenant compte du principe que les droits de propriété influencent les comportements… drôle de coïncidence, n’est-ce pas si on reconsidère selon cet angle les derniers troubles dus aux crises financières mondiales ou les conflits dans les pays qui affichent, comme par hasard, un taux de croissance élevé? Enfin, la théorie la plus intéressante du lot, appelée communément la théorie de l’agence qui complète celle des droits de propriété. Cette théorie repose sur la notion de la relation d’agence formalisant les relations entre des individus aux intérêts divergents et déterminants des contrats incitatifs optimaux.
Ainsi donc, si on laisse vagabonder un peu notre imagination, le monde sera considéré, par extrapolation, comme une vaste entreprise au sein de laquelle les ˝patrons˝ auront à mettre au point une ingénieuse stratégie commerciale basée sur la géopolitique et la géo-économie pour s’accaparer les ressources, écouler les produits et contrôler les marchés ; tandis que les états, les Hommes avec leurs diverses croyances et leurs institutions seront assujettis et collaboreront tels des agents au service de ces boss. Faisons encore usage de notre faculté fabulatrice : le monde sera-t-il littéralement un continuum politico-économique aux yeux de cette firme dont l’organe délibérant vote toujours et à l’unanimité en faveur de la devise mercantile ?
Et qu’y a-t-il de meilleur vecteur pour cette stratégie que cet habile concept de gouvernance qui exige d’un état une lisibilité claire et une certaine auditabilité pour rallier cette doctrine qualifiée par ses propres créateurs de démocratique et qui permet d’intégrer la sphère généreuse des donations ou plutôt des récompenses…le morceau de sucre après le numéro en quelque sorte ! Et quel numéro ! Prodigieux ! Eh oui, éliminer la souveraineté des états, éradiquer les frontières et refaçonner la face du monde par le truchement de la logique bancaire relève carrément du prodige.
Justement, concernant les états, et plus particulièrement leur gestion, la gouvernance fait référence à un ensemble d’interactions entre les différentes institutions du pays. La bonne gouvernance serait, alors dans ce cas, le fonctionnement harmonieux de l’ensemble des systèmes de gestion (politique, économique et social) qui détermine formellement les processus par le biais desquels ces différentes institutions exercent le pouvoir au sein d’un pays donné.
Et qu’en est-il pour les pays émergents tel le Maroc, fort de sa culture millénaire et caractérisé par sa pluralité sociale ? Doit-il se conformer à ce nouveau système de gouvernement d’entreprise proposé et/ou imposé par les officines financières qui jouent le rôle de fiduciaire dans un contexte international entaché des prémisses d’un effondrement économique ? Ou s’agit-il encore de l’une des conditions sine qua non pour achalander des investissements d’envergure et déclarer un bon résultat selon les indicateurs arrêtés par ces mêmes officines? Autant de questions que les économistes, les chercheurs universitaires, les juristes et d’autres encore se sont efforcés ces dernières années d’y répondre et sont toujours entrain de naviguer à l’aveuglette dans cette mer de sargasses.
D’un autre coté, on constate et nullement par hasard que le gouvernement marocain actuel a été renforcé par une structure ministérielle en charge de la gouvernance, en l’occurrence le Ministère des Affaires générales et de la gouvernance dont l’une des missions principale est d’asseoir les principes édictées par la nouvelle constitution qui a érigé la bonne gouvernance en tant que condition essentielle à la réalisation d’un développement durable et équilibré et en tant que levier principal de l‘édification d’un état de droit. Le plan d’action de ce département est fondé sur l’action intégrée et l’approche participative pour enclencher le processus d’une gouvernance plus renforcée qui transcende tous les volets de la vie politique, administrative et socioéconomique. Les premières assises nationales de la gouvernance, organisées par le MAGG les 12 et 13 février 2013 à Rabat ont permis de jeter les premières bases de la définition de la stratégie nationale de cette gouvernance au Maroc, que c’est prometteur !
De plus, la position privilégiée du Maroc, notamment avec la communauté européenne, ce continent agonisant, influence ce choix stratégique car le flux d’investissement y a augmenté ces dernières années et il est ˝normal˝ que les bailleurs de fonds s’assurent quant à leurs placements puisqu’il n’est plus à démontrer que le degré de respect par les sociétés de certains principes fondamentaux de bon gouvernement d’entreprise joue un rôle grandissant pour les décisions et la pérennité de ce genre d’investissements.
Toutefois, reconnaissons-le, il reste avantageux pour le Maroc que les modes de gestion de ses institutions, aussi bien centralisées que décentralisées, soient formalisés et transparents pour permettre l’application de la corrélation de la responsabilité avec la reddition des comptes et dans la foulée, éradiquer aussi bien l’aspect discrétionnaire que l’impunité de certaines sphères décisionnaires qui détiennent une sorte de pouvoir atavique.
Seule l’abstraction de l’aspect culturel fait tâche d’huile dans ce projet car il faut bien reconnaître que nous restons des gens passionnés et croyants… et hélas pour les experts modernistes et les profilers, la passion et la foi ne peuvent guère être formalisées !
Concrètement donc, pour pouvoir pleinement bénéficier de la mondialisation des marchés de capitaux et en attirer à long terme ceux, qualifiés de « patients», notre pays doit se doter de régimes de gouvernement d’entreprise crédibles et lisibles à l’étranger et de surcroît respecter un socle minimum de principes reconnus. Soit! Restons politiquement correct et respectons cette décision stratégique Cependant, au lieu que nos concitoyens s’adaptent et adoptent ces principes nés dans l’occident, ne valait-il pas mieux opérer le contraire et que ces derniers prennent en considération la mentalité marocaine ?
C’est dans ce sillage, qu’en mars 2008, la Commission Nationale de Gouvernance d’Entreprise a élaboré et lancé le Code Marocain des Bonnes Pratiques de Gouvernance d’Entreprise. Ce document rassemble des principes généraux de bonnes pratiques de gouvernance. Cette Commission a, également, élaboré et lancé les annexes spécifiques aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux établissements de crédit respectivement en décembre 2008 et en avril 2010. A ce sujet, il est à noter que les recommandations de ces codes sont complètement inspirées des principes directeurs de la bonne gouvernance de l’OCDE, à quelques adaptations prés.
Par ailleurs, le Maroc a opté pour le choix de s’inscrire d’emblée dans un gigantesque projet de changement de structuration et ce, en multipliant les cadres de benchmarking, la ratification des conventions de jumelage, les inscriptions aux programmes internationaux tels le programme « Hakama » financé par la banque mondiale, le PNUD Maroc, Mena, FMI, le programme ROSC, etc.
Heureusement, cette vision marocaine de la bonne gouvernance accorde beaucoup d’importance à la notion de développement humain durable, car le concept y est fortement associé. Le choix stratégique du Royaume s’est fondé sur la définition explicite du développement durable qui fut établie par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement des Nations Unies, dite Commission Brundtland, du nom de Gro Brundtland, premier Ministre de la Norvège alors chargée de mission à l’ONU. Dans son rapport intitulé « Notre avenir à tous » le développement durable est défini comme : « Le développement soutenable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. »
Bref, on peut dores et déjà conclure qu’au niveau de l’Etat, la Gouvernance n’est pas synonyme de gestion ou management des affaires publiques et que c’est plutôt l’exercice de l’autorité économique, politique et administrative pour gérer les affaires de la nation à tous les niveaux. De ce fait, elle inclut les mécanismes institutionnels par le biais desquels les citoyens et groupes articulent leurs intérêts, exercent leurs droits, et s’acquittent de leurs obligations. Dans la même coulée, on peut également conclure que la bonne gouvernance est un des moyens pour atteindre le « Développement Humain Durable »
Partant de là, il s’avère que cette vision de gouvernance ne peut pas être l’apanage de l’Etat. Au contraire, elle est censée être l’affaire aussi bien de l’Etat, de la société civile que du secteur privé. D’où la grande conclusion sujette à polémique : « La gouvernance transcende l’Etat » ; et c’est là où réside le risque puisque c’est exactement là où émergent clairement les prémisses d’un nouvel ordre mondial au sein duquel les gouvernements ne sont plus que de simples composantes de la gouvernance.
Ainsi donc et malgré les attraits flamboyants de ce nouveau concept de gouvernance qui imbrique aussi bien la dimension gestionnaire que politique, force est de constater que la notion de gouvernance présente quelques zones d’ombres à dénotation douteuse. En effet, l’ingérence des organisations internationales, notamment financières, dans la gestion publique des pays parait comme une immixtion politique dans les affaires de l’état et partant, s’impose d’emblée comme une remise en cause des programmes d’ajustement structurel imposés par lesdites organisations et de leurs véritables desseins puisque la chose publique devient sujet international et par conséquent objet de table ovale.
En outre, plusieurs allusions à connotation politique contenues dans les recommandations de ces organisations de financement et de développement laissent supposer une orientation vers une gouvernance globale ou mondiale en faveur des donateurs qui technicisent les crises pour imposer une ligne de conduite financière dissimulant une visée éthno-confessionnelle. Dans ce cas, le concept de gouvernance ne serait-il qu’un cheval de Troie pour la régulation de l’économie mondiale en l’orientant vers un sens unique ? Cela est d’autant plus vraisemblable lorsqu’on constate le paradoxe flagrant dans cette nouvelle théorie qui se dit vouloir combler le fossé des disparités sociales et qui œuvre néanmoins en faveur de l’hégémonie de la loi du marché. Pis encore, le concept préconise l’équilibre entre le système politique international et le système économique mondial alors que ses préceptes tendent vers le profit du commerce international aux mains d’une minorité.
D’autres critiques plus sévères encore font de la gouvernance une sorte d’apologie de la loi du marché ou pire encore, une tactique de l’ordre économique pour prendre la place de l’ordre politique ou encore une ultra stratégie pour chambouler l’ordre mondial basé sur le système de gouvernement afin d’éradiquer ce dernier ou le réduire à un simple rôle supplétif, quel projet de grand œuvre d’oligarchie n’est ce pas !
Résumons donc, pour nous autres habitants de cette planète, désabusés et désillusionnés, nous avons pris conscience que le globe semble être devenu une sorte de laboratoire pour l’application de théories complexes de conditionnement sociétal et d’aliénation commerciale, et partant, nous sommes devenus sceptiques et incrédules à tout ce qui émane de la sphère des groupes à puissance économique.
Il faut dire que les « G » ou les parties prenantes de ce monde tentent depuis quelques années et vainement de gérer les nuées successives des crises dans ce monde en proie à un véritable désarroi socioéconomique et qui échappe de plus en plus à leur domination. En effet, aussi informelle que ce soit la relation de ces géants et aussi insensée que ce soit la vision onirique des officines financières de vouloir appliquer littéralement la métaphore de Platon et chercher à gouverner les hommes, force encore est de constater que le monde actuel est sujet à une vraie remise en cause institutionnelle. La question logique serait alors si ce trouble international est le résultat d’un effet domino ou est-il du à une quelconque manipulation à l’échelle planétaire ? Et dans ce cas, qui en seraient les marionnettistes ? Tout cela sans pour autant verser dans les fumisteries telle la théorie du complot ou celle encore plus celle plus farfelue des illuminati ou les sectaires maîtres du monde.
En fait, même si ces prétendus démiurges existent, ils ne sont logiquement et par effet boomerang que des agents eux-mêmes au service d’autres nébuleuses ou apprentis sorciers dont l’ambition démesurée est de manager et de standardiser le monde à leur façon et qui font partie, sans le savoir, d’une équation d’une sorte de matrice dont le système de gestion est devenu aléatoire et incontrôlable, c’est en quelque sorte, l’enchantement qui s’est retourné contre l’enchanteur.
Néanmoins, devant le fait du désagrégement des valeurs humaines et devant le ridicule des multiples scénarios parfaitement élaborés dans un chambranle de mapping intégré que nous servent chaque jour les médias et la toile virtuelle, devenus entre-temps eux aussi des agents, il est légitime de se prémunir contre l’avènement de ce nouvel ordre mondial dont les sermonneurs ne nous inspirent guère confiance puisque l’homme du 21ème siècle n’est plus dupe de leurs conspirations et de leur tentative de modélisation du monde par la démolition systématique de toutes les valeurs qui contrecarrent leur projet de domination.
Pour cela, rien de mieux qu’un repositionnement culturel par rapport aux ambitions immodérés de ces prétendus gestionnaires du monde, surtout que le concept de gouvernance semble avoir négligé la dimension culturelle et l’intelligence de l’Homme. Une révolution culturelle, en quelque sorte, mais guère similaire à celle de Mao Tsé Tong. Au contraire, cette révolution culturelle, qui doit être enclenchée par les esprits encore libres de ce monde, doit être pacifique et universelle afin de rétablir les valeurs culturelles humaines qui sauvegardent la dignité de la vie et prône son épanouissement dans un monde tolérant, juste et qui appartient équitablement et naturellement à tout le monde, agent ou panurge.
Pour terminer, finissons quand même par une pointe d’optimisme, tout d’abord, quoique qu’on fasse, la terre ne sera jamais pyramidale ; ensuite et pour revenir à Platon qui, le premier, parla de gouverner les Hommes, son disciple Aristote le Stagirite, quant à lui, a répondu ˝savoir, c’est pouvoir˝ et c’est tout dit..
Hassane Najeh